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Le Centre PraME de l’UNamur contribue à la restitution d’une charte scellée de 1176

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La charte médiévale munie du sceau du comte de Flandre Philippe d’Alsace ©Archives de l'Etat

C’est un véritable trésor qui a été restitué à la Belgique par le Metropolitan Museum of Art (New York) en cette fin janvier : une charte médiévale munie du sceau du comte de Flandre Philippe d’Alsace, anciennement conservée à l’abbaye de Messines (Flandre occidentale), et qui avait disparu au début de la Première Guerre mondiale. Retour sur les tribulations de ce document d’archives, dont la restitution résulte d’une collaboration fructueuse entre le Centre PraME de l’UNamur, les Archives générales du Royaume et le Ministère des Affaires étrangères.

Jean-François Nieus est Maître de recherches FNRS, professeur au Département d’histoire de l’UNamur et directeur du Centre de recherches Pratiques médiévales de l’écrit (PraME) de l’institut PaTHs. Ses travaux portent sur le pouvoir princier et la domination seigneuriale durant le Moyen Âge central dans le comté de Flandre et son espace périphérique. Il s’intéresse en particulier à l’administration organisée autour de ces grands seigneurs médiévaux et à la production écrite et sigillaire qu’elle génère.

C’est en 2016, lors d’une discussion avec un ami historien lui aussi féru de sceaux médiévaux, Samuel Mathot, que l’attention de Jean-François Nieus se porte sur une mention figurant dans un catalogue en ligne des collections en réserve du Metropolitan Museum of Art de New York. Une brève description annonce une charte d’un comte de Flandre datant du 12e siècle. Jean-François Nieus commande une photo à la célèbre institution américaine. À sa vue, plus de doute : il s’agit d’une charte de l’ancienne abbaye bénédictine de Messines (aujourd’hui Mesen, en Flandre occidentale). Les archives de cette abbaye ont connu un sort tragique : situé sur la ligne de front en 1914, l’établissement multiséculaire est pillé puis détruit, et ses archives dispersées en Allemagne.  

Jean-François Nieus alerte Thérèse de Hemptinne, professeure émérite à l’Université de Gand et elle aussi experte en diplomatique (la science qui étudie les « diplômes » médiévaux, chartes et actes divers, ndlr). Ils avertissent ensemble les Archives générales du Royaume qui prennent le dossier en main et se mettent en contact avec le Metropolitan Museum, détenteur du précieux document depuis son don en 1923 par un donateur privé. Le musée opère alors un examen approfondi de la charte, qui confirme sa provenance. Il prend alors la décision – exceptionnelle pour cette grande institution – de remettre ce document à la Belgique, par l’intermédiaire du Ministère des Affaires étrangères et des représentants diplomatiques belge et américain.

Remis officiellement à la Ministre Hadja Lahbib ce 26 janvier 2023, l’acte retrouvera bientôt sa place au sein des chartes rescapées de l’abbaye de Messines, conservées au dépôt des Archives de l'État à Bruges. Si elle ne peut que réjouir les scientifiques et les passionnés d’histoire médiévale, cette nouvelle fait également le buzz auprès des médias en Belgique.

Une charte qui témoigne du statut des scribes de l’entourage princier

Mais ce document, de quoi parle-t-il ? Jean-François Nieus explique : « Ce document est intéressant à plusieurs titres. D’abord, il porte un magnifique exemplaire du second sceau de Philippe d’Alsace, qui fut comte de Flandre entre 1157 et 1191, et qui montre pour la première fois ses armoiries. Ensuite, il constitue un témoignage évocateur du statut dont bénéficiaient les hauts fonctionnaires qui entouraient le prince ». La charte, octroyée en 1176, détaille en effet une dotation du comte de Flandre au grand administrateur Robert d’Aire, transmise ensuite à son successeur Gérard de Messines, notarius et sigillarius meus (« mon notaire et garde-scel »). Le texte prévoit le devenir de cette dotation après le décès de Gérard de Messines : un moulin et un bâtiment du comte « où on vend la laine » seront récupérés par la collégiale Notre-Dame de Saint-Omer et une terre reviendra à l’abbaye de Messines. « On constate que ces hauts fonctionnaires, professionnels de l’écrit et de l’administration, étaient richement dotés et réellement choyés par le prince, signe de leur importance au sein de son entourage », continue Jean-François Nieus. « Pouvoir accéder au document autorise aussi l’étude de ses caractéristiques matérielles. A-t-il été élaboré par les religieuses de Messines ou émis par la chancellerie comtale ? Peut-être est-il de la main de Gérard de Messines lui-même ? ».

Une collaboration fructueuse entre le centre PraME et les Archives générales du Royaume

Le centre de recherches interdisciplinaire Pratiques médiévales de l’Écrit (Institut PaTHs) entretient des collaborations scientifiques de longue date avec les Archives générales du Royaume et leurs dépôts provinciaux. Plusieurs ouvrages, expositions et colloques ont été organisés en commun. « Les Archives de l’État et l’UNamur sont également partenaires dans le cadre du programme FED-tWIN, un nouveau programme fédéral de recherche qui soutient la collaboration entre universités et établissements scientifiques fédéraux », se réjouit Jean-François Nieus. L’historien médiéviste Nicolas Ruffini-Ronzani, premier chercheur FED-tWIN de l’UNamur, partage ainsi son temps entre le centre PraME et les Archives de l’État à Namur. « La découverte et la restitution de la charte de l’abbaye de Messines souligne une fois encore le caractère fructueux de cette collaboration », conclut Jean-François Nieus.